Équipe Immétis - 08/21/2024
La nouvelle fait grand bruit depuis son annonce le 20 août. Et pour cause : Québec suspendra la délivrance de certains permis de travail pour des emplois sur l’Île de Montréal à compter du 3 septembre 2024 pour une durée de six mois.
Quels sont les impacts concrets de cette mesure, et qui sont les employeurs et travailleurs concernés ? Immétis décrypte la situation.
Coup de frein au Programme des Travailleurs Étrangers Temporaires : qui est concerné ?
Équipe Immétis - 08/21/2024
La nouvelle fait grand bruit depuis son annonce le 20 août. Et pour cause : Québec suspendra la délivrance de certains permis de travail pour des emplois sur l’Île de Montréal à compter du 3 septembre 2024 pour une durée de six mois.
Quels sont les impacts concrets de cette mesure, et qui sont les employeurs et travailleurs concernés ? Immétis décrypte la situation.
RECRUTER DES TRAVAILLEURS ÉTRANGERS TEMPORAIRES : LA MÉCANIQUE
L'international : pourquoi ?
Pour répondre à leurs besoins en main-d’œuvre, certains employeurs font le choix de se tourner vers des bassins de candidats à l’international. Cette option est choisie lorsqu’il n’est pas possible de combler le poste par le recrutement d’un Canadien ou d’un résident permanent, faute de candidats disponibles.
Bien que les coûts et les délais soient supérieurs à un recrutement en local, la voie de l’international permet d’accéder à un plus large bassin de candidats. Et ainsi d’augmenter ses chances de combler les postes à pourvoir.
Quelles sont les démarches à entreprendre ?
La règle générale pour recruter un ressortissant étranger est de faire la preuve que cette d’embauche n’aura pas d’impact sur le marché du travail local. L’employeur doit également démontrer qu’il n’est pas parvenu à combler le poste par un Canadien ou un résident permanent, et, que les conditions offertes au candidat étranger seront au moins équivalentes à celles dont bénéficient les employés locaux.
Cette procédure s’appelle une demande d’Étude d’Impact sur le Marché du Travail (EIMT) et s’inscrit dans le Programme des Travailleurs Étrangers Temporaires (PTET). L’employeur y déclare les conditions du poste à pourvoir : poste et mission, lieu d’emploi, rémunération, avantages… Au Québec, province jouissant d’une certaine autonomie dans la sélection de ses immigrants, l’EIMT doit être accompagnée d’une demande de Certificat d’Acceptation du Québec (CAQ). L’EIMT est en quelque sorte une autorisation préalable donnée à l’employeur de recourir à la main d’œuvre étrangère, à la suite de laquelle le candidat pourra demander un permis de travail.
Il existe différents types d’EIMT, certaines nécessitant un affichage du poste sur des sites d’emploi, d’autres non. Le choix se fait en fonction du poste à pourvoir et du profil du candidat. Un principe général s’applique toutefois pour toutes les EIMT, lesquelles sont distinguées entre les hauts et les bas salaires. Au Québec, tous les postes rémunérés en deçà de 27,47 $ / heure, sont considérés comme à « bas salaires » et tous ceux rémunérés au-delà sont considérés comme à « hauts salaires », avec des obligations différentes pour l’employeur selon que l’emploi se trouve dans l’une ou l’autre des catégories.
LES CHANGEMENTS
À compter du mardi 3 septembre 2024, la réception et le traitement de certaines demandes d’EIMT/CAQ pour des postes à bas salaires, sur l’Île de Montréal, seront suspendu, et cela pour une période initiale de six mois.
Selon les déclarations des autorités, cette suspension ne devrait viser que 3 500 travailleurs au cours des six prochains mois, à rapporter aux 300 000 titulaires d’un permis de travail établis au Québec.
Qui est concerné ?
En réalité, la suspension ne s’applique qu’aux demandes d’EIMT initiales ou déposées pour un renouvellement pour les postes pour des postes rémunérés moins de 27,47 $ / heure, soit 57 000 $ annuellement pour un emploi de 40 heures et situés sur l’Ile de Montréal.
Aux fins du moratoire, l’Île de Montréal comprend les municipalités suivantes :
- Baie-D'Urfé
- Beaconsfield
- Côte-Saint-Luc
- Dollar-Des Ormeaux
- Dorval
- Hampstead
- Kirkland
- L’Île-Dorval
- Montréal
- Montréal-Est
- Montréal-Ouest
- Mont-Royal
- Pointe-Claire
- Sainte-Anne-de-Bellevue
- Senneville
- Westmount
Les municipalités limitrophes, telles que Brossard, Longueuil ou Laval, ne sont ainsi pas visées par la mesure.
La mesure exclut encore certains secteurs d’activité clés. Plus spécifiquement : l’enseignement, la santé et les services sociaux, la transformation alimentaire, l’agriculture et la construction. Les entreprises de l’Île de Montréal, exerçant dans l’un de ces secteurs d’activité, pourront donc toujours déposer des demandes d’EIMT et ce quel que soit le salaire offert.
Prenons un exemple concret. Un cuisinier qui exerce au sein d’un CHSLD sur l’Île de Montréal ne sera pas touché par cette suspension, et cela, même s’il occupe un poste à bas salaire. En revanche, ce même cuisinier qui exercerait son poste au sein d’un restaurant à Montréal, toujours pour un salaire inférieur à 57 000 $ annuels, serait quant à lui visé par la réforme.
LES IMPACTS
L'impact pour les employeurs de travailleurs étrangers temporaires
Les compagnies souhaitant pourvoir des postes impactés par cette mesure ne pourront plus présenter de demandes d’EIMT à compter du 3 septembre.
Plusieurs choix s’offriront alors :
- Parvenir à combler le poste par le recrutement d’un travailleur déjà présent au Canada,
- Identifier des candidats à l’international qui pourraient obtenir un permis de travail par le biais d’un autre programme que celui des travailleurs étrangers temporaires, tels que Jeunes professionnels par exemple,
- Reporter le recrutement à une date ultérieure, sans garantie toutefois que le moratoire ne soit prolongé ou étendu.
Les conséquences ne sont pas moindres pour les employeurs ayant actuellement à leur embauche des travailleurs visés par la mesure.
Si leur permis de travail vient à échéance au cours des six prochains mois, et qu’une EIMT est requise pour leur renouvellement, ils n’auront pas la possibilité de renouveler leur permis, et devront donc quitter leur emploi si aucune solution alternative n’est identifiée.
Là encore, prenons un exemple concret.
- Une entreprise en services-conseils sur l’Île de Montréal a actuellement à son embauche un Chargé de Marketing, rémunéré 55 000 $ annuellement ;
- Le travailleur dispose d’un permis Jeune Professionnel expirant en janvier 2025 (émis sous le Programme de Mobilité Internationale), permis qui n’est pas renouvelable ;
- L’entreprise devait entreprendre une demande d’EIMT/CAQ pour le conserver à son emploi.
Du fait du moratoire, à compter du 3 septembre, elle ne sera plus en mesure de présenter une demande d’EIMT/CAQ, et ne pourra donc pas entreprendre les démarches de renouvellement. Si la demande ne peut être présentée avant le 3 septembre, pour conserver le travailleur à l’emploi, l’une des options serait alors d’augmenter son salaire, pour exclure son poste des mesures en place.
Cependant, il s’agit-là d’un effort pouvant être conséquent pour les employeurs, et pouvant remettre en cause l’équité salariale entre les employés.
VERS LA FIN DE L'IMMIGRATION TEMPORAIRE ?
Pour le Gouvernement du Québec, ce moratoire constitue « un premier pas » dans la volonté affichée de réduire de l’immigration temporaire. Le Gouvernement entend également réduire ses missions de recrutement à l’étranger, et présenter un projet de Loi visant à encadrer le nombre d’étudiants internationaux dans les établissements.
Cependant, le recours à l’international demeure essentiel pour de nombreuses entreprises au Québec. Malgré la hausse du nombre de résidents permanents, certains secteurs d’activité souffrent de pénuries de main-d’œuvre importantes. L’aéronautique, l’enseignement ou la manufacture en sont des exemples. En l’absence de candidats disponibles pour combler ces postes, le recrutement de travailleurs étrangers constitue une solution pour soutenir le développement et la croissance des entreprises concernées
Dernière mise à jour le 21 août 2024. Photo de Fauxels sur Unsplash
Le présent article contient de l'information générale en matière d'immigration, vise à en vulgariser les termes et ne constitue en aucun cas un avis juridique. Pour obtenir un avis juridique complet, contactez nos professionnels.